17 avril 2012

« Shalom India Résidence » – Esther David

Où je me dis que décidément, chacun de mes voyages littéraires en Inde me plaît énormément et m’interpelle et résonne au plus haut point.

L’idée de départ de ce roman est ce qui m’a attirée : une communauté juive vivant à Ahmedabad, dans une résidence où cohabitent plusieurs générations de juifs Bene Israël, les juifs vivant en Inde ! Je dois admettre que j’ignorais jusqu’à leur existence (environ un milliers de juifs restant en Inde dans les années cinquante, « lorsque des centaines de milliers de juifs étaient partis pour la Terre promise» p.19) mais que le mélange des deux cultures m’intéressait beaucoup tout autant que la présentation de son auteur, en 4e de couverture, plus que plaisante :

Née en 1945 au sein de la communauté juive d’Ahmedabad, Esther David est peintre, sculpteur et historienne de l’art. Elle dispense une éducation alternative dans les bidonvilles.

Esther David

C’est donc avec tous ces éléments atypiques à mes yeux que j’ai ouvert les premières pages de ce livre, entre roman et recueil de nouvelles. En fait chaque chapitre porte le nom d’un personnage habitant dans la fameuse résidence. Ce chapitre peut être vu comme un tout indépendant mais est aussi étroitement lié à tous les autres chapitres et personnages. D’ailleurs chaque nouveau chapitre traite d’un personnage apparaissant déjà dans le précédent.

L’élément commun à tous ces chapitres qui font fi du temps qui passe – tous ne se déroulent pas exactement au même moment – est le prophète Élie qui ouvre le roman de sa visite à chaque appartement de l’immeuble Shalom India, nous présentant au passage chaque personnage. Un premier chapitre habité d’une fantaisie et d’un réalisme magique m’ayant fait penser par moments à Raphaël Confiant :

Le prophète Élie descendit alors sur Terre, pour se poser devant la porte de la résidence Shalom India d’Ahmedabad ; il s’arrêta devant une voiture, vit son reflet dans le pare-brise et tira un peigne de sa poche pour lisser ses boucles ébouriffées par le vent. (p.16)

Les différents récits sont très dépaysants, au point qu’ils m’ont poussé à cuisiner indien plus d’une fois tant les descriptions des repas et tenues éveillaient mes sens mais, heureusement, ce roman ne se contente pas d’ «exotisme» !

En nous décrivant les vies de Ezra, Sippora, Ben Hur, Juliet, Ezel et les autres, Esther David nous fait part du poids des traditions hébraïques et indiennes, toutes deux si écrasantes pour les jeunes, notamment en ce qui concerne les mariages. Au final les plus malheureux ne sont pas les mariages mixtes,  loin de là! On y découvre aussi que la judaïté ne fait pas toute l’identité (juive) des personnages qui rêvent parfois de vivre en Israël et se rendent compte qu’il s’agit d’une vie bien différente de l’Inde qu’ils connaissent et aiment. Nous vivons aux côtés des personnages les différentes étapes de leurs vies, la solidarité qui unit la plupart d’entre eux, les secrets, regrets et malheurs que certains partagent quand d’autres les enfouissent. Et puis l’auteur ne nous épargne pas les détails horribles mais pourtant vrais des émeutes ayant eu lieu en 2002, embrasant Ahmedabad qui jusqu’alors était un mélange paisible de familles hindoues, musulmanes, parsies et chrétiennes. Viols, personnes brûlées vives, décapitées… une claque violente qui émaille de temps en temps le récit, comme pour rappeler l’origine de cette résidence, les peurs de certains parents dont l’enfant fréquente une personne n’appartenant pas à la communauté juive.

Décidément, mes lectures indiennes me plaisent toujours énormément, celle-ci ne déroge pas à l’heureuse règle ! Je compte bien lire les deux autres romans de l’auteur dont Le Livre de Rachel qui a obtenu le prix Eugénie Brazier du roman gourmand (oh la la, vous le connaissiez, vous, ce prix ? C’est criminel de décerner une telle distinction, il va falloir que je me penche sérieusement dessus d’autant que j’ai bien deux-trois romans entrant dans cette catégorie dans ma PAL).

Merci à Agathe des Éditions Héloïse d’Ormesson pour ce très bel envoi.

Shalom India Résidence – Esther David – Éditions Héloïse d’Ormesson – 301 pages – 2012

12 commentaires:

  1. Ton billet me fait bien envie, je le note dans ma LAL :)

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  2. Il me manque toujours des clés de compréhension avec les romans qui se passent en Inde. C'est dommage parce que je sais que je passe à côté de belles découvertes.

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    1. Oh oui, en effet, quel dommage! :( Quel genre de "clés" as-tu l'impression qu'il te manque? Il est vrai que dans ce livre, j'ai oublié de le mettre dans mon billet, la seule petite réserve est qu'il n'y a pas de notes de bas de page expliquant certains termes... heureusement peu m'étaient inconnus mais j'imagine bien qu'il n'en est pas de même pour tous les lecteurs et même le peu qu'il me manquait m'a parfois un peu embêtée, j'ai dû les chercher....

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  3. Une lecture bien tentante en effet ! Deux mondes aussi riches réunis en un seul !

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  4. Je ne connais pas du tout! j'ai bien aimé qu'il te pousse même à faire de la cuisine indienne! Même s'il n'est pas que cela, cela prouve combien parfois on peut "être" dans un livre au point de vouloir prolonger!

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    1. Oui Claudia, j'étais complètement dans ce livre qui m'a transportée dans une culture qui me plait par certains égards (musique, cuisine, spiritualité, yoga) depuis longtemps. Une lecture très prenante!

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  5. je viens tout juste de le commencer, agréable,
    bonne journée

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  6. Noté pour mes futures lectures ! Je commence à peine à découvrir la littérature indienne et c'est avec grand bonheur ^^

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  7. Je suis comme toi une fan de littérature indienne, alors hop, dans la liste à lire!

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    1. Comme tu as dû le voir j' ai un libellé "littérature indienne" si tu veux lire d'autres billets et noter d'autres titres encore meilleurs que celui-ci ;)

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