18 mai 2011

En route pour Cuba ! #2 – Nicolás Guillén, la négritude cubaine

Contrairement à mon billet d’hier, aujourd’hui il est question d’un poème écrit par un homme qui a contribué à la scène culturelle cubaine dès les années 1930, quand être communiste signifiait être persécuté, emprisonné et s’exiler… incroyable mais vrai!

En recherchant des auteurs cubains à découvrir, je suis tombée sur le nom de Nicolás Guillén qui m’a immédiatement rappelé un poème lu au collège, en cours d’espagnol. Malheureusement, impossible de me rappeler du titre ce qui est, je vous laisse l’imaginer, très frustrant!

Nicolás Guillén

J’ai donc cherché d’autres poèmes et ai lu celui-ci :

           Un son para niños antillos (1977)       

Por el Mar de las Antillas
anda un barco de papel
anda y anda el barco barco,
Sin timonel.


De la Habana a Portobelo,
de Jamaica a Trinidad,
anda y anda al barco barco,
Sin capitan.


Una negra va en la popa
va en la proa un español :
Anda y anda el barco barco,
con ellos dos.


Pasan islas, islas, islas,
muchas islas, siempre mas ;
anda y anda el barco barco,
sin descansar.


Un cañon de chocolate
contra el barco disparo,
y un cañon de azucar, zucar,
le contesto.


¡Ay, mi barco marinero,
con su casco de papel !
¡Ay, mi barco negro y blanco
sin timonel !


Alla va la negra negra
junto junto al español ;
anda y anda al barco barco
con ellos dos.

Une chanson pour les enfants antillais
Voguant sur la Mer des Antilles
avance un bateau de papier
le bateau avance, avance,
sans timonier.
De La Havane à Portobel,
de Jamaïque à Trinité,
le bateau avance, avance,
sans capitaine.
Une négresse est à la poupe
à la proue est un espagnol :
le bateau avance, avance,
avec eux.
Passent des îles et des îles,
des îles et puis d’autres îles ;
le bateau avance, avance,
sans repos.
Un canon tout en chocolat
a tiré contre le bateau,
qui de son canon tout en sucre,
a répondu.
Ah ! mon bateau filant sur l’eau
avec sa coque de papier !
Ah ! mon bateau tout noir et blanc,
sans timonier !
Sur le bateau va la négresse
et l’espagnol
le bateau avance, avance
avec eux.

 

Nicolás Guillén (1902-1989) était un poète cubain métisse. Précision utile pour comprendre son œuvre puisque ce poète contribue grandement, dans les années 1930, au développement du « négrisme », un mouvement inspiré et convergeant vers la négritude d’Aimé Césaire.  Guillén souhaite ainsi réunir et réconcilier les héritages africains et espagnols. De  plus, il veut lutter contre le racisme et donner aux métisses et noirs leur juste place, en finir avec l’idée de domination et d’asservissement qui règne aux Antilles comme en Amérique et en Europe.

Ainsi, dans « Un son para niños antillanos », poème rythmique en apparence adressé aux seuls enfants, Guillén nous donne à voir la femme noire. Elle est, au départ, à l’arrière du bateau, à l’image des femmes africaines dans les cales des bateaux négriers, donc en position « inférieure» aux hommes blancs, espagnols. Mais ce sont pourtant ces femmes, esclaves, qui ont donné naissance au métissage. À mesure que le bateau vogue, le rapprochement se fait. Toutefois, cette situation est ambivalente : amour ou viol? Il semble que Guillén ait choisi la vision positive, celle de la réconciliation : « anda y anda al barco barco / con ellos dos. le bateau avance, avance / avec eux. »

Et voici ce même poème lu par son auteur, ici!

D’ici le week-end, je vous présenterai le fameux poème (lu au collège) que j’ai finalement retrouvé! D’ici là, buena noche.

mois cubain

8 commentaires:

  1. Très beau poème ! J'aurai un message (pas encore publié) qui fera écho au tien sauf que je n'ai pas autant présenté l'auteur, alors je renverrai vers ta note, hihi! :)

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  2. Lamalie > merci pour cette attention. J'ai très envie de découvrir ton billet!

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  3. Merci pour cet article très intéressant !!

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  4. Je fais un blocage sur tous les auteurs de la Négritude depuis le lycée... je déteste Aimé Césaire, mais vraiment (et j'ai lu deux de ses ouvrages majeurs, au lycée justement)... mais ça ne veut pas dire que je ne soutiens pas la démarche bien sûr :-) (mais mon problème aussi, c'est que je n'aime pas la poésie...)
    Enfin Nicolas Guillén, c'est un nom que l'on retrouve très souvent lorsque l'on parle de Cuba :-)

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  5. Stephie > merci à toi!

    Cryssilda > pour la poésie je ne suis pas réceptive à tout mais là vraiment c'est très fort, touchant, vivant. Sinon, pour le reste, les goûts et les couleurs... je respecte cela et moi-même, bien que je soutienne et admire la négritude, n'ai pas réussi à lire un Césaire, hum ^^'

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  6. Ah ce poème ! Ma soeur m'en parlait tout le temps, il était dans son livre d'espagnol.
    Moi non plus je ne suis pas très poésie et encore moins Aymé Césaire (même s'il est de la Martinique). J'ai lu La tragédie du roi Christophe et ça m'a suffi.
    C'est une excellente idée de découvrir ces auteurs cubains, je vais m'en inspirer. A part Nicolás Guillén, José Martí et Alejo Carpentier dont j'ai entendu parler, je ne connais personne.

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  7. Aimé Césaire, pardon. On voit que je l'apprécie.

    A propos du poème, ma soeur me rappelle qu'Hughes Aufray l'avait chanté.

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  8. Jackie Brown > bienvenue ici! :) J'espère en effet que mes découvertes t'inspireront.

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